n°241 – « Donner cette vision globale de l’entreprise… »

Modifié le 9 mai 2024.

Par Philippe Naszalyi

 

45 ans ! C’est l’âge de notre revue, en ce début 2010. Fondée dans les meilleures années de la croissance gaullienne, le « miracle français »,
elle se proposait en ce premier éditorial de 1965 de « Donner cette vision globale de l’entreprise…
1».

 

Une revue qui décloisonne les champs de l’activité

« Quelles que soient ses fonctions, un Cadre de Direction, a fortiori un chef d’entreprise, doit être en mesure aujourd’hui de saisir dans leur interdépendance
les problèmes soulevés par la conduite des Affaires.

S’il n’a de ces problèmes qu’une vue partielle, limitée à son champ de responsabilité, il ne peut jouer pleinement son rôle car pour être
efficace, l’action doit être solidaire, intégrée et coordonnée dans un plan d’ensemble.

Enfin, pour avoir une vue complète de l’activité de l’entreprise, chaque responsable doit pouvoir la situer dans le contexte où elle
s’exerce. Il lui faut de plus en plus étendre son horizon au-delà des frontières du secteur d’activité qui lui est familier ».

 

Une revue qui embrasse tous les aspects du management

« Avec l’apport des diverses disciplines scientifiques, et des techniques nouvelles qui en sont résultées, ces méthodes de gestion tendent à se multiplier
en se spécialisant.

Ce faisant, elles deviennent plus hermétiques et plus disparates.

Il est de plus en plus difficile de les relier entre elles, d’en délimiter les champs d’application, d’en apprécier les possibilités
d’utilisation.

Or, tout Cadre de Direction doit être en mesure, de situer dans une perspective globale, non seulement les problèmes de l’entreprise, mais
également, les méthodes permettant de les résoudre.

C’est pourquoi, il nous a paru nécessaire, à côté des revues spécialisées consacrées à ces différentes méthodes, d’offrir […] une
publication qui en fasse une synthèse, utile également pour le spécialiste ».

 

Une vision pragmatique et propédeutique de la Recherche

« Les méthodes de Direction et de Gestion évoluent rapidement. Parmi les innovations dont elles font l’objet,

– les unes, d’ordre théorique, n’ont dans l’immédiat, que des applications limitées. Il est bon cependant d’en connaître les principes,
quand ce ne serait que pour se préparer à les mettre en pratique ;

– les autres ont déjà fait leur preuve et sont susceptibles de recevoir de larges applications. Mais présentées dans un langage souvent
ésotérique, elles sont encore peu connues.

Tous ceux dont le rôle est de faire évoluer les entreprises dans le sens du progrès, doivent pouvoir se tenir au courant des
perfectionnements ainsi apportés aux méthodes de direction et de gestion.

Présenter ces perfectionnements en les illustrant par des exemples concrets, voici notre troisième objectif ».

 

Notre revue n’a pas failli à ses objectifs initiaux, quelles que soient les critiques, çà et là entendues ou lues, le champ de la direction et
gestion des entreprises s’est élargi au domaine des organisations publiques et nous avons étendu le champ de nos analyses. Ne parle-t’on pas de gouvernance publique ou de productivité dans les
services de l’Etat ?

Le domaine académique s’est ouvert à la « gestion », cette petite dernière nées dans les années 1960 en France, et devenue «
sciences »
, avec au moins autant de légitimité que nombre de ses consoeurs des sciences humaines, voire des sciences du vivant. Nous avons accompagné et porté sur le devant cette évolution
nécessaire, sans tomber dans les dérives de la déshumanisation provoquées par la modélisation qui fait florès dans d’autres sciences et vient de montrer son inanité et sa vacuité pédante.
Diafoirus a étendu son discours bien au-delà de son champ originel.

C’est pour y résister que nous avons maintenu le cap des « exemples concrets ». Point de management ou de gestion «
hors-sol »
dans nos colonnes. Nos articles ne sont pas une compilation de lectures diverses et généralement limitées d’ouvrages inadaptés à nos sphères entrepreneuriales. Il n’est que de
lire les bibliographie des articles de certaines revues pour comprendre que produire est généralement traduire et dans le meilleur des cas compiler. Ce n’est pas notre sens de la Recherche et
tant pis si nous dérangeons toujours en ne choisissant ni la facilité ni la médiocrité.

L’internationalisation pour nous, est de publier des auteurs du monde entier qui appliquent leur recherche à des sujets locaux, variés,
différents et par le fait même exemplaires, enrichissants et originaux, et non pas de plagier, résumer, imiter sans invention des auteurs souvent dépassés – la crise vient de donner un coup de
vieux certain, aux « thuriféraires des idées des autres ». Sans aller jusqu’à lancer l’anathème, rappelons-nous ce qu’écrivait déjà en 1927, Julien Benda ; « La loi du clerc est,
quand l’univers entier s’agenouille devant l’injuste devenu maître du monde, de rester debout et de lui opposer la conscience humaine. »
2

Ce premier numéro de la 45e année, se situe donc dans cette triple volonté initiale, décloisonner, considérer tous les domaines et
s’appuyer sur le terrain de l’expérience pour produire un véritable bouillon de culture, destiné autant aux cadres dirigeants qui voudraient sortir de l’immédiateté pour réfléchir avant d’innover
et agir, qu’aux enseignants pour lesquels les exemples nouveaux présentés ici, permettront de compléter leurs travaux, aux chercheurs qui comme nous le souhaitons, seront toujours enclins à
discuter, critiquer, vérifier pour créer encore du savoir nouveau, aux consultants qui veulent apporter toujours plus à leurs clients entrepreneuriaux dans une tourmente où les certitudes passées
se sont effondrées, à tous ceux enfin qui, lecteurs curieux, grapillonneront çà et là, leur provende…

… à la lecture de ces deux forts dossiers, le premier sur l’Innovation dans son aspect spatial : réseaux et territoire, et le second,
sur la mesure de la performance qui entraîne tant de bouleversements humains.
 

 

1. Les citations en italiques sont extraites du 1er éditorial de notre revue en 1965.

2. Benda (Julien) : La Trahison des clercs, Paris (1927). Julien Benda dénonce la capitulation des intellectuels français.