Un nouveau sondage confirme l’aversion des Français contre les anglicismes dans les messages publicitaires. La délégation générale à la langue française et aux langues de France (DGLFLF) a publié le 3 avril 2025 les résultats d’une étude Toluna/Harris Interactive concernant “Les Français et l’emploi de la langue française”. Réalisée en novembre 2024, elle porte sur la perception de la langue française et la présence de mots et expressions issus de langues étrangères comme l’anglais dans l’espace public.
Les anglicismes génèrent des réactions de « gêne » voire de « colère »
Dans le prolongement d’une étude du CREDOC (“Le multilinguisme en France aujourd’hui – opinion, usages, pratiques 2021”), ce nouveau sondage confirme que l’utilisation de mots ou expressions en anglais dans un message publicitaire conduit à des réactions majoritairement négatives : l’emploi d’anglicismes « intéresse » ou « plait à »19 % des sondés seulement ; alors qu’il suscite chez 45% des sondés des réactions de « gêne » voire de « colère ». Ces proportions sont aussi dans le droit fil de l’enquête du Crédoc selon laquelle 47% des Français se déclaraient « agacés » ou « hostiles » aux messages publicitaires contenant des mots en anglais.
“Pour les marques, s’exprimer avec des anglicismes illustrerait leur caractère supposément innovant”
Ce constat est-il de nature à mettre un frein à l’inflation des anglicismes plus ou moins ridicules ou déplacés dans les campagnes publicitaires ? Rien n’est moins sûr. En mars 2023, le Conseil de l’Éthique publicitaire, qui a pour mission d’éclairer l’Autorité de régulation professionnelle de la publicitaire, pointait « le recours devenu très systématique à l’anglais ou au globish ». il concluait : « le problème est celui de l’appauvrissement de la pensée et celui de l’exclusion pour une partie de la population (…) ». Force est de constater que cette mise en garde n’a guère été suivie d’effet. L’anglais ou plus exactement ce qui « a l’air d’être anglais » est privilégié par sa valeur supposée de modernité, d’innovation et d’ouverture au monde. Pour les marques, s’exprimer avec des anglicismes illustrerait leur caractère supposément innovant, notamment pour s’adresse aux jeunes.
« Cette conviction est tellement forte qu’elle ne souffre aucune réflexion et aucun questionnement : elle fonctionne comme une doxa, une croyance absolue ».
Les publicitaires et communicants gagneraient pourtant à méditer cette phrase de Nelson Mandela : « Si vous parlez à un homme dans une langue qu’il comprend, cela va à sa tête. Si vous lui parlez dans sa langue, cela va à son cœur. »
Texte de Pierre GUSDORF – Défense de la langue française
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